le personnel doit surveiller le malade transfusé pour vite intervenir
Transfusion sanguine

Surveillance du malade

Les transfusions sanguines ne rencontrent aucun problème dans la majorité des cas. Mais le personnel soignant doit surveiller le malade transfusé afin de pouvoir intervenir le plus rapidement possible en cas de problèmes. Ces problèmes sont appelés des effets indésirables.

 

Gestes à réaliser devant une transfusion mal tolérée


Les signes possibles traduisant la mauvaise tolérance d’une transfusion sont : hyperthermie avec ou sans frissons, agitation, sensation de chaleur, douleurs lombaires ou surtout thoraciques, hypotension voire collapsus, plus rarement hypertension, nausées ou vomissements, diarrhée, bouffées de chaleur, dyspnée, pâleur, sensation de prurit ou d’urticaire, saignements (en particulier aux points d’injection), tachycardie.

L’observation d’un ou plusieurs de ces signes impose :

  • L'arrêt immédiat de la transfusion, l'appel du médecin de proximité
  • Le maintien d’une voie d’abord pour la perfusion d’un soluté
  • Un examen clinique incluant la prise de la température, de la pression artérielle, la mesure de la fréquence cardiaque, l’examen des urines
  • La saisie de l’unité en cours de transfusion, des tubes de sang disponibles et des contrôles effectués
  • La mise en place des mesures thérapeutiques immédiates (réanimation)
  • La transmission des unités de sang au laboratoire de bactériologie en cas de suspicion d’accident par contamination bactérienne, au laboratoire d’immuno-hématologie en cas de suspicion d’accident immuno-hémolytique (accompagnées de prélèvements du malade), en informant les correspondants de l’établissement de soins et de l'établissement de transfusion qui pourront coordonner leurs actions et en diligenter d’autres en fonction des observations cliniques
  • Réalisation d'une fiche de signalement de l'événement indésirable et transmission au service de délivrance de l'EFS le plus rapidement possible afin d'éviter que les autres produits du même donneur ne soient transfusés
  • L’ensemble des observations fera l’objet d’une déclaration dans les 48 heures au réseau d’hémovigilance sur une Fiche d'Evènement Indésirable Receveur (FEIR).


 

Effet Indésirable chez le receveur


Les effets indésirables survenant chez un receveur de produits sanguins labiles doivent faire l'objet d'une déclaration dans le cadre de l'hémovigilance. Ils peuvent avoir des manifestations différentes :

  • Frissons et sensation de malaise : Ce type de manifestations peut être observé en cas d'accidents immunologiques
  • Réactions allergiques : Cette réaction se produit dans moins de 1% des transfusions sanguines. Elle se manifeste par de l'urticaire ou d'autres réactions de la peau, qui sont traitées rapidement à l'aide de médicaments appropriés.
  • Fièvre : Cette fièvre peut se manifester avec ou sans frissons. Elle peut provenir d'une bactérie présente dans les produits sanguins labiles transfusés.
  • Détresse respiratoire : la détresse respiratoire est observée lors d'œdèmes aigus pulmonaires (OAP), elle apparait chez le patient à la suite d'une surcharge.
  • Allo-immunisation : La transfusion peut conduire à l'immunisation du patient envers les cellules du sang transfusé. Dans ce cas, aucune manifestation clinique n'est observée. Seules les analyses de recherche d'anticorps irréguliers (RAI) peuvent permettre de détecter cet effet indésirable.
  • Purpura post-transfusionnel: ce syndrôme est rare et généralement observé en 9 jours environ après une transfusion de CGR ou de plaquettes. Un purpura ecchymotique et pétéchial brutal est observé avec une thrombopénie. Le diagostic est réalisé par une recherche d'allo-immunisation antiplaquettaire.
  • Fièvre et signes cutanés : ces symptômes peuvent être observés en cas de maladie du greffon contre l'hôte (GVH) à la suite d'une transfusion sanguine.

Le plasma transfusé est essentiellement responsable de syndrômes de détresse respiratoire aigüe (TRALI : Transfusion Related Acute Lung Injury) et de manifestations allergiques.

 

Accidents immunologiques


Ces accidents immunologiques apparaissent lorsque les anticorps du patient réagissent avec les globules rouges de la transfusion sanguine, ou lorsque l'anticorps des produits sanguins labiles réagit avec les globules du patient. Afin d'éviter cela, des mesures de dépistage ont été mises en place tant sur les produits sanguins que chez le receveur, comme les recherches d'anticorps irréguliers (RAI). Malheureusement, ces analyses ne suffisent pas à supprimer ce type d'accident même si elles ont conduit à une grande réduction des risques. En effet, ce test biologique ne détecte que les anticorps présents et en quantité suffisante pour être détectés; il n'est donc pas possible de détecter les anticorps trop anciens.

Son délai de survenue par rapport à l'épisode transfusionnel permet de distinguer trois formes cliniques :

1. Accident hémolytique immédiat :

L'hémolyse est, dans ce cas, intravasculaire. Le patient présente de la fièvre souvent accompagnée de frissons, de tremblements et d'une sensation de malaise. Les douleurs sont plus significatives quand elles sont le long du trajet veineux de l'injection ou lombaires mais elles peuvent être de localisation variable (thoraciques, abdominale ou des flancs). Dans les formes sévères, le plus souvent dû à une incompatibilité ABO, un collapsus cardiovasculaire (tachycardie, hypotension) apparait rapidement, pouvant conduire à une perte de conscience. On observe chez le patient des urines foncées avec oligo-anurie puis un subictère, voire un ictère des téguments et des muqueuses notamment conjonctivales.

 

2. Accident hémolytique subaigu :

Cet accident retardé survient au-delà de 24 heures. L'hémolyse survient en intratissulaire. Une allo-immunisation ancienne, non détectée lors de la RAI, peut en être la cause. La clinique est rarement grave avec apparition d'un ictère et l'observation d'une inefficacité transfusionnelle. Elle nécessite néanmoins une surveillance de la fonction rénale.

 

3. Accident hémolytique retardé :

L'hémolyse est observée plusieurs jours, voire plusieurs semaines après la transfusion sanguine. Le tableau clinique est subictérique. Une allo-immunisation primaire en est le plus souvent la cause.

 

Réaction allergique


Les réactions d'hypersensibilité immédiate peuvent être observées lors de transfusions. Elles peuvent être liées à 3 mécanismes différents :

  • la présence chez le receveur d'anticorps qui vont réagir avec un allergène contenu dans le produit sanguin labile
  • la présence dans le PSL d'anticorps ou de lymphocytes provenant d'un donneur sensibilisé qui vont déclencher une réaction chez le receveur
  • la présence dans le PSL de substances accumulées au cours de sa conservation, susceptibles de déclencher une réaction chez le receveur.

Tous les symptômes d'hypersensibilité immédiate peuvent être observés : choc anaphylactique, angio-oedèmes, crises d'asthme et urticaires. Dans ce cas, plusieurs médicaments peuvent être nécessaires selon les cas : adrénaline, corticoïdes, bronchodilatateurs ou antihistaminiques.

 

Accidents infectieux


Les accidents infectieux se caractérisent par un choc toxi-infectieux associé à des frissons intenses et prolongés avec hyperthermie, pâleur livide avec cyanose et refroidissement des extrémités, polypnée superficielle, diarrhée, douleurs abdominales souvent violentes, vomissements, hypotension puis collapsus avec oligoanurie.

Ce choc toxi-infectieux est dû à une prolifération microbienne des germes du donneur dans les produits sanguins labiles qui vont être transfusés. Dans ce cas, il faut arrêter immédiatement la transfusion sanguine et mettre en oeuvre une réanimation adaptée au choc et à l'infection.

La confirmation de l'infection provenant des produits sanguins doit être faite en réalisant une hémoculture sur les produits transfusés. Dans le même temps les autres produits sanguins du donneur seront mis en quarantaine durant l'enquête.

 

Transfusion Associated Circulating Overload (TACO)


Les TACO ou œdèmes aigus pulmonaires (OAP) de surcharge constituent une complication des transfusions sanguines fréquente et grave, figurant en tête des causes de mortalité transfusionnelle. En effet, l'incidence des TACO varie de 1/12 354 à 1/129 produits sanguins labiles (PSL) transfusés; ainsi 1 à 5,7% des patients transfusés seraient concernés. Cette complication reste sous-déclarée.

Le TACO apparait lorsqu'une augmentation du volume intervient à la suite d'une transfusion sanguine au niveau des cavités cardiaques droites et que la pression du ventricule gauche est élevée. Ces deux conditions vont conduire à une augmentation rapide de la pression capillaire pulmonaire puis à une extravasation de liquide plasmatique dans les alvéoles pulmonaires et donc à un œdème pulmonaire.

L'élévation des pressions de remplissage du ventricule gauche conduisant à l'œdème pulmonaire se rencontre dans les trois situations : une dysfonction systolique ventriculaire gauche, une valvulopathie ou une dysfonction diastolique ventriculaire gauche. Les risques de TACO sont donc observés chez :

  • les patients avec une altération de la fonction systolique
  • les patients porteurs d'un rétrécissement aortique serré ou d'un rétrécissement mitral serré
  • les patients âgés de plus de 70 ans

Le TACO est observé par une détresse respiratoire 6h suivant la transfusion voire dans les 12h. Chez un patient en ventilation spontanée, une polypnée est habituellement associée à une cyanose, une orthopnée, une toux et dans les formes les plus sévères, une expectoration rosée, mousseuse et abondante. Chez un patient en ventilation assistée, les signes d'alerte sont une baisse de la situation en O2, parfois une désadaptation du respirateur. L'échographie cardiaque permet de confirmer l'OAP et son mécanisme afin de permettre la prise en charge thérapeutique la plus adaptée. L'objectif du traitement est de faire baisser très rapidement les pressions de remplissage du ventricule gauche. Le traitement devra être réalisé le plus tôt possible afin de garantir le pronostic vital du patient.

Afin de limiter le risque de TACO, il faut transfuser 1 CGR sur 1h et l'espacer d'une autre transfusion de 3h ou de plusieurs jours. La surveillance du patient est essentielle dans la prévention d'un TACO grave. Les mesures de la pression artérielle, de la fréquence cardiaque, de la température et de la fréquence respiratoire, voire de la saturation en O2 doivent être faites juste avant la pose de la poche, dans les 15 premières minutes puis régulièrement. La surveillance se poursuit après la fin de la transfusion.

 

Transfusion Related Acute Lung Injury (TRALI)


Le TRALI est défini comme un oedème pulmonaire lésionnel survenant dans les 6 heures suivant la fin de la transfusion d'un produit sanguin, et dont toute autre cause a été écartée. Cette lésion pulmonaire est caractérisée par une hypoxémie et des images radiologiques d'oedème interstitiel ou alvéolaire en l'absence d'éléments évoquant une hyperpression auriculaire gauche.

L'incidence du TRALI est beaucoup plus élevée pour les PFC mono donneurs et les concentrés de plaquettes d'aphérèse que pour les concentrés de globules rouges et les mélanges de concentrés de plaquettes standard (MCPS).

 

GVH post-transfusionnelle


Les GVH (maladies du greffon contre l'hôte) post-transfusionnelles peuvent se manifester à la suite d'une transfusion sanguine. Elles se manifestent principalement par de la fièvre et des signes cutanés. Le rash cutané débute par un érythème puis une éruption maculo-papuleuse, initialement centrale. Elle s'étend dans les extrémités pouvant aboutir à un érythème généralisé avec formation de bulles. Lors de ces effets indésirables, l'anoxie, les nausées, les vomissements, des diarrhées aqueuses ou sanglantes sont également observés. Ils peuvent s'accompagner d'une cytolyse hépatique, d'une hyperbilirubinémie et d'une pancytopénie 1 à 9 semaines après la transfusion. L'issue de la GVH est fatale dans 90% des cas. Elles sont observées essentiellement chez des malades immuno-déprimés (baisse de l'immunité à la suite d'une maladie). Les rares cas de GVH observés chez des patients immunocompétents sont observés chez les sujets qui ont un haplotype HLA identique au donneur, ce dernier étant homozygote.

Les GVH post-transfusionnelles sont liées à la transfusion de cellules lymphoïdes histocompatibles. Les lymphocytes transfusés ne vont pas être reconnus chez le receveur comme des lymphocytes étrangers. Ces lymphocytes T immunocompétents persistent chez le malade et conduisent à une réaction immunologique de type GVH. Cette perception des lymphocytes non étrangers est le fait de la compatibilité d'antigène HLA. Pour éviter ces cas, les produits sanguins labiles sont irradiés pour les patients présentant un affaiblissement immunologique car l'irradiation évite la réponse mitogène des lymphocytes.